Cas clinique n°13

Dyspnée chez une tortue des steppes (Testudo horsfieldii)

Dr Lucille LAMBINET - Vétérinaire

Dr Lucille LAMBINET

Dr Lucille LAMBINET Vétérinaire
Biographie

News Letter n°13 - Septembre 2020


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1. Commémoratifs et anamnèse 

Flash la tortue des steppes mâle de 3 ans

  • Flash est une tortue des steppes mâle de 3 ans. Il vit en terrarium dont les conditions d’entretien sont douteuses. Il a été achetée en animalerie il y a 6 mois.
  • Flash présente des difficultés respiratoires évoluant depuis 5 jours (éternuements puis râles de plus en plus fréquents puis abattement)

2. Examen clinique

  • Flash pèse 55 grammes, est abattu
  • Il présente de la dyspnée (respire gueule ouverte) mais pas de jetage. 
  • Sa carapace est molle 

Bilan clinique : dyspnée+ ostéodystrophie motivant une hospitalisation

3. Hypothèses diagnostiques

Concernant la dyspnée


Atteinte respiratoire haute :

  • Corps étranger.
  • Rhinite infectieuse.


Atteinte respiratoire profonde :

  • Pneumopathie d’origine infectieuse favorisée par un refroidissement de l’environnement (conditions de détention inadaptées).

Pneumonie bactérienne (mycoplasmes, Pseudomonas, Aeromonas, E. coli, Klebsiella, Proteus, Salmonelles) ,Pneumonie virale (Herpesvirus),Pneumonie mycosique (aspergillus, candida), Pneumonie parasitaire (nématodes) 

  • Pneumopathie d’origine non infectieuse: Corps étranger, néoplasie, traumatique, cardiaque.

Cause environnementale : coup de chaleur.
Compression pulmonaire : obésité, ascite, masse cœlomique.


Concernant l’atteinte de la carapace, carapace molle, ostéodystrophie

Origine métabolique :  

  • hyperparathyroïdie secondaire d’origine nutritionnelle (=maladie métabolique osseuse (régime alimentaire carencé en calcium et d’une hypovitaminose D3, manque UVB))
  • hyperparathyroïdie secondaire d’origine rénale (hyperphosphatémie hypocalcémie) 

Origine infectieuse

4. Examens complémentaires

Des radiographies ont été réalisées

Les images sont en faveur d’une pneumopathie sévère du poumon droit, associée à une dilatation gastrique aérique compatible avec la détresse respiratoire et/ou une gastrite. Diminution de la densité osseuse ainsi que de la carapace, compatible avec une hypocalcémie d’origine nutritionnelle / environnementale.

NB : Les examens complémentaires se limitent aux radiographies, pour des raisons financières, le propriétaire n’a pas souhaité réaliser de prélèvement trachéal. étant donné l’état alarmant de la torture, les frais ont été gardés pour la suite des soins et la surveillance en hospitalisation de Flash.

NB : pour mycoplasme PCR sur écouvillon nasal buccal.

Radiographie de flash la tortue Radiographie de flash la tortue secondaire

5. Conclusion et diagnostic

  • Pneumopathie d’origine probablement infectieuse: mycoplasmes probables
  • Ostéodystrophie fibreuse métabolique (HPTH II Nutritionnelle)

6. Traitement et pronostic

  • Oxygénothérapie : mise en cage à oxygène 
  • Analgésie : Morphine (MORPHINE ND) à la dose de 0,2 mg/kg par voie intra-musculaire, une fois.
  • Anti-inflammatoire non stéroïdien : Méloxicam (INFLACAM ND) à la dose de 0.2mg/kg par voie intra-musculaire, une fois par jour.
  • Antibiotique : Oxytétracycline (TERRAMYCINE ND) à la dose de 10mg/kg par voie intra-musculaire, une fois par jour.
  • Complémentation en calcium : Gluconate de calcium à la dose de 100mg/kg par voie intra-musculaire, une fois par jour.
  • Réalimentation assistée : Emeraid Herbivore 0,5mL (25% du besoin énergétique) une fois

Le pronostic est réservé.

7. Evolution et suivi d'hospitalisation

Flash reste abattu et anorexique les premiers jours d’hospitalisation. Puis progressivement vivacité + appétit, les difficultés respiratoires s’estompent au bout de 72h d’hospitalisation. 


Il est sorti d’hospitalisation au bout de 72h avec le traitement suivant : 

  • Antibiotique oxytetracycline par injection intra-musculaire, une fois par jour, pendant 15 jours.
  • Contrôle radiographique quelques jours avant l’arrêt du traitement antibiotique.
  • Complémentation en calcium (CALCI REPTILE) à vie+ changer la lampe UVb tous les 6 mois 
  • Conseils environnementaux :  La température en journée dans le terrarium doit être dans les 30-35°C et la nuit autour de 25-28°C. Installer un gradient de température (point chaud et point froid) dans le terrarium. Limiter le plus possible les sorties de Flash de son terrarium.

8. Evolution et suivi à J+30 et J+75

Les contrôles à J30 et J75 révèlent une évolution lente, mais favorable de l’état général et des images radiographiques. 

Les antibiotiques sont arrêtés à J 105.

EVOLUTION ET SUIVI A J+30 et J +75 n1 EVOLUTION ET SUIVI A J+30 et J +75 n2 EVOLUTION ET SUIVI A J+30 et J +75 n3

10. Evolution et suivi à J+105

Contrôle à J+105 : 

  • Toujours bon état général : 66g (poids stable).
  • Contrôle radiographique : persistance d’un foyer d’opacité alvéolaire en région latero-ventrale du lobe pulmonaire droit compatible avec un foyer cicatriciel secondaire à la pneumopathie diagnostiquée.
  • Arrêt du traitement antibiotique.

11. Discussion

La rhinite contagieuse est l'une des maladies les plus fréquemment observées chez les tortues terrestres méditerranéennes en France (Testudo graeca et Testudo hermanii), mais elle affecte aussi d'autres espèces hors de nos frontières.


Les rhinites à mycoplasme des tortues sont causées par Mycoplasma agassizii, M. testudineum.


Ses espèces cibles sont Testudo, Gopherus, Indotestudo, Pyxis, Terrapene…


Elles se manifestent par du jetage, de l’épiphora, du blépharoedème.


Et elles se transmettent par contact entre tortues (sécrétions nasales contaminantes).


Le temps d’incubation est de deux semaines environ. Cette maladie évolue souvent vers la chronicité (il y a alors des poussées successives et cela peut affecter les poumons par la suite si non traités).


Cette rhinite survient en général sur des tortues affaiblies par des conditions de maintenance inappropriées. 


Le diagnostic de cette maladie peut se faire par PCR sur écouvillon nasal ou trachéal, mais cela n’a pu être réalisé sur notre cas par manque de moyen.


On pourra discuter aussi de l’importance des conseils environnementaux aux propriétaires de NAC, particulièrement les reptiles dont les principales maladies sont favorisées par l’environnement inadapté et pourraient être évitées par des conditions de détention adaptées à chaque espèce.

12. Conclusion

On insistera sur l’importance des contrôles radiographiques lors de traitement pneumopathie chez une tortue, et sur la poursuite du traitement après la disparition de signes cliniques. L’incidence radiographique crânio- caudale est la plus intéressante pour évaluer l’évolution des lésions.

Bibliographie

*Norton TM. Chelonian Respiratory Disease, NAVC Conference 2012 Small Animal

*Schilliger L .  Les tortues de jardin. Guide zootechnique et thérapeutique, 2007.

*Bennet T. The chelonian respiratory system. Vet Clin Exot Anim. 2011;14:225-239

*De Matteis C. CARNET DE CLINIQUE DES REPTILES, 2004 . Thèse pour le doctorat vétérinaire p.100

* Divers SJ, Stahl  SJ. Mader’s Reptile and Amphibian Medicine and Surgery 3rd ed, 2019. P. 514-520.

*Elliott R, Jacobson MB. Brown LD., Wendland DR., Brown PA. ,Klein MM. ,Christopher  KH. Berry,

Mycoplasmosis and upper respiratory tract disease of tortoises: A review and update, The Veterinary Journal, Vol. 201,  3, 2014, Pages 257-264,

*Schilliger L .  Les tortues de jardin. Guide zootechnique et thérapeutique, 2007.

*Schilliger L. Guide pratique des maladies des reptiles, 2004. p.144-147

*Laniesse D. Réalisation de fiches conseil pour les propriétaires de NAC en complément à la consultation: oiseaux reptiles.  Thèse pour le doctorat vétérinaire 2011

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